Élections législatives : Une nouvelle page

J’ai assisté ce samedi 7 mai, avec un peu d’émotion et pas mal de nostalgie, à la convention de la Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale. Dans la vie militante, il y a parfois des moments fondateurs où il faut être.

Et n’en déplaise aux esprits chagrins, j’y étais dans la fidélité de mes idéaux. Sans retracer ici mon long parcours politique, je situe la rencontre de samedi dans la suite de ma participation en mars 1990 au Congrès PS de Rennes, où autour de Jean-Luc Mélenchon et Julien Dray nous défendions la première motion de la Nouvelle École Socialiste (qui deviendra plus tard la Gauche Socialiste) à travers la nécessité d’une société mobilisée et d’une stratégie d’union "Rouge Rose Verte". La seconde étape refondatrice s’est déroulée le 29 novembre 2008, dans un gymnase de l’Île-St-Denis (93) pour le meeting de lancement du Parti de Gauche avec Jean-Luc Mélenchon, Marc Dolez et mon camarade, trop vite disparu, François Delapierre. Nous avions, ce jour-là, posé les bases d’un parti creuset, commencé à développer notamment le concept de la planification écologique et échafauder la stratégie pour la constitution du Front de Gauche, puis de la France Insoumise… Bref tout un cheminement fait d’avancées, de reculs, de questionnements, de débats et parfois d’engueulades !

Alors, OUI, ce samedi 7 mai, une nouvelle page se tourne. (voir ICI les principales interventions lors de cette convention et notamment le discours de Jean-Luc Mélenchon).

Pour ceux qui ne mesurent pas l’importance du moment, il n’y a qu’à regarder le vent de panique des milieux financiers depuis une semaine. Les éditorialistes du système qui, il y a quelques semaines, moquaient les forces de gauche parce qu’elles allaient séparément devant les électeurs à l’élection présidentielle sont maintenant déchaînés contre la Nouvelle Union Populaire Sociale et Écologique. La NUPES est caricaturée comme un épouvantail gauchiste inconsistant. Les mêmes qui ont critiqué Jean-Luc Mélenchon parce qu’il avait laissé son important score en 2017 "en friche", lui reprochent aujourd’hui d’en avoir tiré des leçons en créant les conditions d’un rassemblement du peuple de la gauche et de l’écologie.

Le 10 avril, 7 712 520 électeurs (21,95%) ont bousculé la donne parce qu’ils refusaient le sinistre duo Macron – Le Pen, que les tenants du système ont préparé depuis des mois. Aujourd’hui, ces électeurs demandent une nouvelle Union Populaire pour pouvoir se débarrasser à la fois de ces politiques de droite rétrogrades et du mépris du chef de l’État. Il n’y a donc pas d’autres solutions dans le cadre des institutions actuelles, que de rechercher à faire élire à l’Assemblée Nationale une autre majorité alternative à celle du Président Macron.

L’immense majorité des français ne veulent pas du programme de la macronie et des droites illustré notamment par recul de l’âge de la retraite à 65 ans quand tant de jeunes restent sur le bord du chemin. Ils refusent aussi ce RSA conditionné à des travaux forcés et sans perspective, tout comme ils réfutent le projet pour l’école où règnerait la compétition entre établissements et un renforcement de la sélection. Une grande partie de la jeunesse mobilisée pour le climat réclame avec force des actes. Une majorité de celles des quartiers populaires, avec leurs parents qui sont "les premiers de corvée", réclame du respect et l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail.

C’est l’honneur des partis de gauche de se hisser au niveau des espérances qui ont été portées le 10 avril avec le bulletin Mélenchon. C’est l’honneur des communistes comme de la majorité des dirigeants et militants écologistes et socialistes d’avoir contribué à ouvrir cette porte à la discussion et de construction avec La France Insoumise.

La direction du PS doit affronter certains anciens ministres qui ne trouvent rien à redire quand l’un des leurs rejoint la macronie, et menacent de tout casser dès lors qu’il s’agit de proposer un projet alternatif et une nouvelle majorité de gauche. Je salue à cette étape le courage du Premier secrétaire du PS procédant à une autocritique sur le mauvais bilan du gouvernement Hollande. Je salue l’attitude de Julien Bayou, dirigeant d’EELV qui s’est affranchi des ambiguïtés de Jadot et s’est mis à l’écart des piteuses trahisons des révolutionnaires de pacotille comme José Bové et Daniel Cohn-Bendit !

Aucun parti politique à gauche ne peut impunément incarner indéfiniment des valeurs contraires à ce qu’il prétend défendre. Nous n’avons plus le temps de tergiverser pour répondre aux urgences écologiques, sociales et démocratiques. Il faut créer les conditions d’une vie meilleure débarrassée des angoisses quotidiennes. Nous n’en pouvons plus des belles paroles contredites par des actes quand les milliardaires se pavanent et les actionnaires des grandes entreprises sont à la fête. Nous n’en pouvons plus des maltraitances sociales et démocratiques.  Nous voulons du changement, ici et maintenant, c'est-à-dire dès le mois de juillet. Le Président sortant n’a obtenu que 20% des voix des inscrits au 1er tour. Il n’a pu être élu qu’avec les voix des électrices et électeurs de gauche qui ont fait barrage à l’extrême-droite. Il ne dispose donc d’aucun mandat populaire pour appliquer son programme au seul service des puissances d’argent.

L’élection présidentielle a montré un cadre institutionnel à bout de souffle. Il devient urgent de passer à une nouvelle république sociale, laïque, démocratique prenant soin des êtres humains et de la nature. La NUPES donne une chance d’aller chercher une nouvelle majorité parlementaire qui respecte les personnalités, les identités, les propositions de chaque force qui la composent tout en ayant une base commune de changement concret. Ce dépassement des divergences passées ne peut se faire qu’avec l’implication active des citoyens. C’est un début de clarification indispensable face à une fausse gauche, qui ne cesse de lorgner vers l’extrême centre macroniste. Il était temps que cette imposture cesse pour que le clivage gauche-droite redevienne central. Je souhaite également que ce rassemblement permette, au-delà de la séquence électorale des législatives, une nouvelle dynamique pour la gauche de ruptures avec des pratiques d’éducation populaire refondée.

Ne sous-estimons pas cependant la violente pression qui va s’exercer sur les candidats, les militants, mais surtout les électeurs. Toute une panoplie de mensonges hurlant à un prochain désastre va y passer. N’en doutons pas, toute la réaction, le grand patronat et les marchés financiers, des gouvernements étrangers, les institutions internationales et notamment les institutions européennes vont se coaliser pour venir en soutien au Président de la République. Mais la nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale, c’est aussi la force du nombre pour la justice sociale, la bifurcation écologique, la démocratie, la liberté et la paix. Le choix est clair. Le 3e tour des élections peut commencer.

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