Centre communal d’action sociale du 15 juin 2023 (2e partie) : L’EHPAD des Grouettes transféré au département

J’aborde dans cette 2e partie du compte-rendu de la réunion du Conseil d'Administration du Centre Communal d'Action Sociale (CCAS) les deux délibérations concernant le transfert de la gestion de l’EHPAD communal des Grouettes auprès du Conseil départemental de l'Essonne.

La première délibération soumise à notre approbation proposait d’approuver une convention de mise à disposition d’une directrice déléguée auprès de l’EHPAD des Grouettes

A la suite du départ à la retraite du directeur de l’EHPAD des Grouettes le 27 mars dernier et afin d’assurer la continuité de la gestion de l’établissement, la municipalité a sollicité le Service Essonnien du Grand Âge (SEGA) pour la mise à disposition d’une directrice déléguée à compter du 16 juin 2023. Le SEGA propose de mettre à disposition du CCAS un agent titulaire, (Grade de Directeur d’établissement sanitaire, social et médico-social de classe normale), pour exercer les fonctions de Directrice déléguée à compter du 16 juin 2023 jusqu’au 15 décembre 2023 inclus, à hauteur de 50 % de son temps de travail, dont 30% en vue d’assurer la continuité de la fonction de direction de l’EHPAD et 20% en vue de la préparation du transfert de gestion de l’EHPAD du CCAS vers le SEGA.

Il a été précisé que la directrice déléguée assurera ses missions sous la responsabilité de la Directrice des solidarités de la Ville et de la Directrice du CCAS. L’EHPAD des Grouettes remboursera au Service Essonnien du Grand Âge (SEGA) le montant de la rémunération et des charges afférentes à cet agent mis à disposition.

J’ai voté pour cette délibération, dans la mesure où l’instabilité doit cesser au plus vite à la direction de la Maison de retraite des Grouette. En 2 ans, il y a eu pas moins de 4 directeurs différents. Il est vraiment grand temps de trouver un peu de sérénité pour les agents, mais aussi les résidents !

La seconde délibération liée à la première, concernait la cession de l’autorisation de l’EHPAD des Grouettes au bénéfice du service essonnien du grand âge (SEGA)

Je publie, tout d’abord, ci-dessous, l’intégralité de la note produite par la municipalité pour justifier le transfert de l’EHPAD des Grouettes au département.

La gouvernance de l’EHPAD est instable depuis plusieurs années pour diverses raisons.

- Des raisons financières dans un premier temps

En effet, la situation financière de l'EHPAD est instable depuis plusieurs années. Depuis 2017, l'établissement enregistre un déficit constant, malgré la subvention d'équilibre versée chaque année par la Ville via le CCAS. Ce déficit s'explique par plusieurs facteurs :

  • Le nouveau marché de la restauration : les denrées deviennent de plus en plus chères. Il y a une volonté de favoriser l'autonomie des résidents et la restauration en EHPAD nécessite la présence obligatoire de certains postes en semaine et le week-end.
  • Des résidents de plus en plus dépendants : de nos jours, les personnes âgées souhaitent rester chez elles le plus longtemps possible, ce qui se traduit par une augmentation du nombre de bénéficiaires du Service d'Aide à Domicile. Malgré tous nos efforts, il y a encore de longues listes d'attente. Lorsque les résidents intègrent l'EHPAD, c'est parce que leur maintien à domicile est devenu impossible en raison de leur niveau de dépendance élevé. Ainsi, les résidents sont plus âgés et plus dépendants qu'auparavant, ce qui entraîne des conséquences financières telles que des besoins accrus en termes de protections, pansements, personnel qualifié, etc.
  • Les mesures gouvernementales : Suite à la crise COVID, le gouvernement a mis en place le dispositif SÉGUR de la santé, qui a conduit à une augmentation de la rémunération des soignants. Cette augmentation concerne l’ensemble du personnel travaillant dans les établissements médico-sociaux, y compris le personnel administratif. Bien que l’Etat compense en partie cette augmentation, il reste à charge 16 000 € par an. A cela s’est ajoutée la hausse de 3,5% de la rémunération des fonctionnaires, dont ont aussi bénéficié les agents de l’EHPAD au 1er juillet dernier.

- En plus de ces difficultés financières, l'EHPAD doit faire face à des défis en matière de gestion des ressources humaines dans un second temps.

Depuis 2018, l'établissement en est à son quatrième directeur, et le dernier vient également de partir. De plus en plus, il devient difficile de recruter des aides-soignants, des infirmiers et du personnel hôtelier, s’agissant de métiers difficiles et souvent peu valorisés.

- Des raisons stratégiques dans un troisième temps car la gestion de ce type d’établissement, de plus en plus complexe, requiert une véritable expertise.

De plus, le gouvernement a défini des mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France faisant suite à des recommandations d’un rapport de mission en EHPAD et USLD. Un amendement adopté en avril 2023 renforce les coopérations avec la création des groupements territoriaux sociaux et médico-sociaux (GTSMS). Autrement dit, les regroupements d’EHPAD publics de petite taille deviendront bientôt obligatoires.

Face à ce constat, il est proposé de transférer l'EHPAD "Les Grouettes" au Service Essonnien du Grand Âge (SEGA).

Le SEGA est un "établissement public départemental de gestion de maisons de retraite publiques créé en 2012 à l’initiative du Conseil départemental de l’Essonne pour renforcer et optimiser la gestion de l’offre publique en EHPAD" . La mise en place de ce Service public Essonnien du Grand Âge (SEGA) avait pour double objectifs de mieux maîtriser l’offre de services en établissements pour personnes âgées (notamment en maîtrisant le coût proposé aux Essonniens sans impacter la qualité des prestations de service) et de rééquilibrer la présence du service public dans l’offre de service destinée aux personnes âgées.

 Le SEGA a la gestion de 7 EHPAD, 1 EHPA (Établissement d'Hébergement pour Personnes Âgées), 5 Accueils de jour, 1 EANM (Établissements d'Accueil Non Médicalisés) 1 CLIC.

La mission première du SEGA est de proposer une offre de services et d’hébergement à destination des personnes âgées de plus de 60 ans dont la perte d’autonomie physique ou psychique ne leur permet plus de rester à domicile. Plus récemment le SEGA s’est également inscrit dans le développement de l’offre d’hébergement en EHPAD pour les personnes handicapées vieillissantes de plus de 45 ans et d’aide à leurs aidants, ainsi que dans les dispositifs de parcours résidents hôpital/Domicile/EHPAD.

L’intégration de l’EHPAD des Grouettes » au SEGA présente plusieurs atouts :

- Mutualiser les compétences, les moyens et les ressources Le secteur des EHPAD publics est marqué par une certaine atomisation de son offre, que les secteurs privés associatif et commercial connaissent moins, en raison de la plus forte concentration de leur offre. Or le regroupement entre structures permet de bénéficier d’un certain nombre d’avantages dont une structure isolée ne peut bénéficier : mutualisations, partage d’expertise, appui technologique, partage d’expérience, facilitation des remplacements, attractivité dans la gestion des carrières, appui à la conduite de projets. Ce regroupement constitue aussi une réponse aux enjeux de transformation de l’offre.

- Maintenir la vocation sociale et le statut public de l’établissement Ce nouveau type de groupement doit contribuer à assurer la pérennité de services publics accessibles et coordonnés dans chaque territoire. Le SEGA présente ainsi l’avantage de ne pas remettre en question l’habilitation à l’aide sociale puisqu’il s’agit de coopération entre établissements publics. Les sites du SEGA travaillent avec les mêmes partenaires du territoire voire des partenaires plus lointains. Ils ont une convention avec l’HPGM, DUPUYTREN et Longjumeau. Les sites ont également des conventions plus locales comme par exemple avec les pharmacies de proximité.

Les agents

Il s'agit d'une opération de transfert d'activité. Les agents ne seront plus rattachés à la Fonction Publique Territoriale, mais à la Fonction Publique Hospitalière. Ils seront réintégrés dans la même grille (grade, échelon). Les agents titulaires auront la possibilité d'être détachés pendant 2 ans. À la fin de cette période, ils pourront demander leur intégration à la FPH. Les employés en CDI et en CDD bénéficieront d'un avenant à leur contrat.

Calendrier prévisionnel

7 juin : Présentation au Comité Social Territorial

15 juin : Vote au Conseil d’administration du CCAS de la délibération pour mise à disposition d’une directrice d’appui 3 jours par semaine à compter du 16 juin et vote au Conseil d’administration du CCAS de la délibération relative au transfert de gestion.

30 juin : Vote au Conseil d’administration du SEGA l'accord du transfert de gestion

31 août : Dépôt de la demande formelle de transfert par le SEGA

Du 15 juin au 15 septembre : Entretiens individuels avec les agents

18 décembre : Date effective du transfert de gestion.

Après cette présentation, je suis intervenu pour expliquer mon vote.

J’ai d’abord précisé que je partageais les constats sur la situation financière très dégradée, et pour laquelle mon groupe au Conseil municipal a alerté, en vain, depuis plusieurs années. J’ai ensuite indiqué que les défis en matière de gestion des ressources humaines et la nécessité d’expertises pour "bâtir la société du bien vieillir en France", s’imposaient à tous. Et donc demain, ces défis ne disparaîtront pas avec le transfert de la gestion au département. Par contre, j’ai contesté l’interprétation hasardeuse d’un amendement qui aurait été adopté en avril dernier au Parlement (j’attends qu’on me communique la référence exacte que je n’ai pas trouvé). Justifier le transfert au département au motif que les « regroupements d’EHPAD publics de petite taille deviendront bientôt obligatoire » est actuellement faux et au moins très prématurés. D’autant plus que la majorité sénatoriale actuelle (LR), dans laquelle milite le maire de Saint-Michel, défend plutôt des mesures visant la renforcer l’autonomie des communes et à réduire les transferts de compétences. Concernant le SEGA, j’ai rappelé que cette structure avait été créée par Jérôme Guedj, alors Président PS de la majorité de gauche au Conseil général en 2012. C’est un bon outil pour préserver le caractère public des établissements pour personnes âgées et personnes handicapées et pouvoir mieux contrôler l’utilisation de l’argent public, tout en offrant aux résidents des prix de journée plus abordables que dans le secteur privé spéculatif. Par contre, j’ai émis plusieurs réserves concernant l’évolution de la situation des agents, la vie au quotidien des résidents et les relations avec les familles. Au sein de la nouvelle structure SEGA, les agents peuvent être conduits à effectuer des remplacements ou à pallier des besoins sur d’autres établissements. Si parfois, pour certains, ces affectations peuvent les rapprocher (ou les éloigner) de leur domicile, voire leur offrir de meilleurs (ou de moins bonnes) conditions de travail, ou encore ouvrir des perspectives d’évolution de carrières qui sont forcément plus limitées au sein d’un seul (petit) établissement, ceci peut aussi produire une instabilité néfaste dans l’organisation du travail au sein de l’EHPAD. D’autre part, ce turn-over des agents n’est pas forcément un gage de confiance, de sérénité et de tranquillité pour les résidents, de plus en plus âgés, et leur famille. Je n’ai pas eu de garantie sur le maintien à minima du même nombre de postes sur l’établissement. La mutualisation au sein du SEGA risquant même de diminuer sur site les postes liés à la gestion administrative et financière, même s’il a été évoqué la possibilité d’astreinte administrative certains week-end pour être à l’écoute des familles. L’incertitude est grande concernant la pérennisation sur place de la directrice déléguée qui prend ses fonctions pour 6 mois aujourd’hui et du temps que consacrera à l’avenir l’éventuel futur responsable de la structure à Saint-Michel, qui pourrait aussi gérer ("en même temps") 1 ou 2 autres établissements dans l’Essonne. J’ai suggéré que la nouvelle directrice déléguée puisse venir présenter lors d’un prochain Conseil d’Administration du CCAS à l’automne les dispositions qu’elle entend mettre en place pour le fonctionnement de l’EHPAD. Ma proposition ne semble pas avoir intéressé les élus de la majorité et la directrice de cabinet du maire, présente, exceptionnellement, à notre réunion. Par contre, elle est intervenue lorsque j’ai évoqué un aspect non mentionné dans le rapport de présentation : le devenir du bâtiment. Celui-ci n’est pas propriété de la ville et fait l’objet d’un bail à construction renouvelé, jusqu’en 2052, dans de très mauvaises conditions financières pour la ville en 2021 (lire ICI).

En 2022, le CCAS a payé 151 084, 66 € de loyer, a pris directement en charge plus de 72 000 € de travaux d’entretien et a versé plus de 90 000 € d’impôts et d’assurances diverses. La directrice de cabinet a indiqué qu’il était aussi envisagé de transférer le bail à construction au Conseil départemental, et que celui-ci étudiait même la possibilité de racheter l’équipement, vu le coût important du bail à construction. A suivre…

Enfin, pour l’anecdote, lorsque j’ai évoqué l’importance d’une information complète et objective auprès des résidents et de leur famille, il m’a été répondu qu’un courrier leur était adressé ce jeudi même. Vérification faite, un courrier signé du maire , avait bien été adressé par mail aux familles par le secrétariat de l’EHPAD, à 17h25, juste une heure avant le début de la réunion du CCAS !

Au final, compte-tenu de tous ces éléments, mais aussi des interrogations qui subsistent et malgré l’absence d’alternative face à la gestion financière désastreuse ces dernières années, j’ai préféré m’abstenir sur cette délibération. Notre groupe restera très vigilant tout au long de cette période de transition jusqu’au transfert définitif en janvier 2024.

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